Ces derniers mois ont été particulièrement captivants pour le règne des Fungi. En effet, nombreux ont été les vulgarisateurs, journalistes et scientifiques à s’intéresser aux champignons, même Netflix ne s’est pas privé de lui dédier un documentaire.
Et pour cause… Ils sont partout ! Que ce soit dans la santé, l’alimentation, la mode, l’environnement, aucun domaine n’en réchappe. Impossible de parler médicaments, dépollution, et même origine de la vie, sans devoir aborder la question des champignons.
Étant nous-même une entreprise issue de cette diversité d’usage du champignon (en même temps que des amoureux inconditionnels !), nous nous proposons de revenir sur tout ce qui fait la beauté de ce règne définitivement à part.
Promis, à la fin de cet article, vous ne pourrez plus que les adorer !
Communication Hifas da Terra. 16/11/2021
Les champignons et l’origine de la vie
Et oui, les champignons ont fait partie intégrante du développement de la vie sur Terre. Ni les plantes terrestres ni les animaux terrestres n’existeraient sans eux.
Pour comprendre pourquoi, il faut remonter 65 millions d’années en arrière, lorsqu’un astéroïde a dévasté une bonne partie de la vie présente sur Terre. De l’impact et du manque de lumière qui s’ensuivit, les champignons ont trouvé parmi la vie végétale et animale en déroute, un moyen de se répandre rapidement. Contrairement à eux, les champignons n’ont pas besoin de lumière pour se développer, seulement de matière organique.
Dans cette débâcle, les mammifères ont eu l’avantage évolutif d’être à sang chaud, là où les reptiles, alors majoritaires, à sang froid, furent sensibles aux maladies fongiques. Cela a permis à l’ordre des mammifères d’émerger.
D’autre part, la recherche suggère que c’est au travers de relations étroites avec les champignons, appelées symbioses, que les premières plantes ont pu passer de la vie aquatique (alors peuplée d’algues vertes) à la vie terrestre. Certains scientifiques pensent même qu’ils sont véritablement à l’origine du règne animal et sont à la recherche d’un ancêtre commun !
Pas de vie sans le sol
Comme nous venons de le voir, les champignons ont longtemps été les seuls êtres à peupler le sol. En fait, les premiers spécimens ont évolué sur Terre entre 715 et 810 millions d’années, bien avant l’arrivée des premières plantes. Il se pourrait bien qu’ils soient même plus anciens que cela. En 2019, on les pensait âgés de “seulement” 460 millions d’années.
La raison de cette présence historique dans les sols rocheux réside dans le métabolisme des champignons, car les minéraux contenus dans les roches leurs sont essentiels. C’est notamment grâce à leur production d’enzymes et d’acides oxalytiques qu’ils sont capables d’attaquer la roche et d’en récupérer le calcium et les sels minéraux. Se faisant, ils ont participé à la première étape de la construction des sols.
Par la suite, l’arrivée permise des plantes n’est pas anodine puisque c’est grâce à leur travail de photosynthèse que la composition de l’atmosphère a pu évoluer vers quelque chose d’habitable.
Le rôle des champignons dans la Santé
Déjà bien ancrée dans notre histoire…
Depuis des millénaires, les champignons sont utilisés à des fins médicinales, alimentaires ou rituelles. Notre Histoire fourmille d’exemples attestant du lien fort qui unit notre espèce et celle des champignons. Ötzi en est l’exemple le plus connu. Vieux de 5300 ans, cet homme, découvert en 1991 exceptionnellement bien conservé avec ses effets, avait en sa possession des champignons médicinaux (Piptoporus betulinus et inonotus obliquus).
Au cours du siècle dernier, un des exemples emblématiques de l’apport des champignons au monde moderne est la découverte fortuite d’un antibiotique aujourd’hui bien connu : la Pénicilline, produite par Penicillium notatum. Autre exemple, la ciclosporine, médicament isolé à partir de Tolypocladium inflatum, a permis de sauver elle aussi des millions de vies humaines.
et (heureusement) toujours d’actualité
Depuis le début des années 2000, les champignons médicinaux, majoritairement basidiomycètes, ont démontré de nombreuses propriétés pharmacologiques et font l’objet d’un intérêt croissant de la part des scientifiques.
Les champignons médicinaux ont des effets bénéfiques importants sur la santé et présentent un large spectre d’activités pharmacologiques. Sont particulièrement étudiés les triterpènes et les bêta-glucanes des champignons.
L’intérêt croissant pour la mycothérapie nécessite un engagement fort de la communauté scientifique pour étendre les essais cliniques et proposer des compléments sûrs et efficaces. Conscients de ces enjeux, nous nous employons à allouer une partie importante de nos ressources à la recherche et au développement de produits efficaces dans l’accompagnement de maladies, comme le cancer.
L’importance des champignons dans notre environnement
Pour faire simple, les champignons sont les maîtres décomposeurs qui maintiennent nos forêts en vie. Sans les champignons pour aider à la décomposition, toute vie dans la forêt serait rapidement enterrée et étouffée sous une montagne de matière végétale morte.
En décomposant la matière organique morte, ils libèrent des nutriments qui sont ensuite mis à disposition des plantes pour qu’elles poursuivent leur croissance. Alors oui, les champignons ont un lien avec la mort, mais aussi et surtout avec la vie !
L’arbre et le champignon : connectés pour le meilleur
Dans son fabuleux roman, “la vie secrète des arbres”, l’ingénieur forestier Peter Wohlleben évoque un réseau de mycélium permettant aux arbres de communiquer et de s’échanger des ressources. Cette symbiose entre le système racinaire de l’arbre et le champignon est appelée mycorhization. On a ainsi pu démontrer des flux d’azote, de phosphate, ou encore d’eau par ce réseau symbiotique. Il est tellement efficace et connecté que les scientifiques l’ont même appelé world wood web (en référence au world wide web ou internet).
Le vaste réseau de mycélium formé par le champignon est capable d’atteindre des endroits inatteignables par les racines, augmentant ainsi la capacité d’absorption de la plante, à la fois pour l’eau (jusqu’à 60%) et pour les nutriments (P, N, K, Na , Zn …). Ces avantages deviennent particulièrement pertinents dans les zones aux sols pauvres ou pendant les périodes de stress hydrique. De plus, le champignon produit des substances défensives qui protègent la plante contre les agents pathogènes. Sans les mycorhizes, les plantes n’auraient pas pu coloniser aussi efficacement le milieu terrestre.
De son côté, le champignon est aussi contraint de former une symbiose avec les racines, car ce sont les plantes qui, grâce à la photosynthèse, leur fournissent les glucides dont elles ont besoin pour leur nutrition. Par conséquent, les champignons mycorhiziens sont totalement dépendants de cette association, car sans elle, ils ne pourraient pas survivre.
Ce réseau permet non seulement aux champignons et à l’arbre de bénéficier à l’un et l’autre, mais aussi de permettre des échanges au sein des autres arbres lorsque ceux-là sont connectés.
Le saviez-vous ?
Hifas Foresta, une entité du groupe Hifas, est spécialisée depuis plus de 20 ans dans la production d’une quarantaine de variétés de châtaigniers mycorhizés (par des champignons comme le bolet ou la truffe) et apporte des conseils forestiers en Espagne et en Europe. Ces activités contribuent au développement socio-économique durable et respectueux des écosystèmes traditionnels.
Les champignons face aux enjeux environnementaux
La bioremédiation est l’une des alternatives les plus prometteuses pour le contrôle des pollutions environnementales qui ont un impact sérieux sur la santé humaine et l’environnement. Il s’agit d’un processus de dégradation et d’élimination de matières organiques toxiques, provenant par exemple de marées noires, de pesticides et de déchets industriels.
En effet, les champignons ont une capacité unique de dégradation de certains types de polluants organiques comme les déchets lignocellulosiques et la biosorption des métaux lourds. La dégradation des déchets lignocellulosiques est initiée par la libération d’enzymes extracellulaires dans l’environnement, les transformant en des molécules plus petites, plus inoffensives et facilement disponibles pour leur utilisation par d’autres organismes.
Comme beaucoup de gens, nous avons découvert l’immense intérêt et le potentiel des champignons dans la bioremédiation grâce à une intervention TEDx de Paul Stamets, Mycologue, portant le titre évocateur de “Comment les champignons peuvent sauver le monde”.
Un exemple parlant de ce potentiel : en inoculant une parcelle de sol contaminée par du diesel avec des mycéliums de pleurotes (Pleurotus ostreatus), il a été constaté qu’au bout de 4 semaines, 95 % des hydrocarbures avaient été transformés en composés non toxiques.
C’est d’ailleurs pour cette propriété qu’il faut être vigilant quant à l’origine biologique des produits à base de champignons que vous consommez, comme les compléments alimentaires de mycothérapie. Agissant tels des éponges à métaux lourds, les champignons récoltés sur des terrains non biologiques peuvent concentrer du cadmium ou du plomb si ces derniers sont présents dans l’environnement.
La recherche sur le potentiel de bioremédiation des champignons n’en est qu’à ses débuts et offrira sans doute à l’industrie des options pour résoudre les problèmes environnementaux mais aussi alimentaires.
Conclusion
Dans une décennie où les incertitudes s’annoncent légions, les champignons ont beaucoup à faire valoir. En plus des applications déjà bénéfiques à l’Homme dans de nombreux domaines, leur potentiel d’utilisation reste colossal.
Nous aurions aussi pu vous parler de leurs autres implications tout aussi intéressantes dans l’alimentation, la dégradation du plastique ou bien l’habillement, mais un simple article ne suffit pas à leur rendre hommage de manière complète.
Vous l’aurez compris, les champignons sont partout dans nos vies et il n’y a donc aucune raison d’en avoir peur… mais en restant bien informé ! Tout comme M. Stamets, nous sommes persuadés que “les champignons peuvent sauver le monde“.
- Venturella, G et al. (2021). Medicinal Mushrooms: Bioactive Compounds, Use, and Clinical Trials. Int. J. Mol. Sci. 22, 634. doi : 10.3390/ijms22020634.
- Rhodes, Christopher J. (2014). Mycoremediation (bioremediation with fungi) – growing mushrooms to clean the earth. Chemical Speciation and Bioavailability, 26(3), 196–198. doi:10.3184/095422914X14047407349335
- Bonneville, S. et al. (2020). Molecular identification of fungi microfossils in a Neoproterozoic shale rock. Science Advances, 6(4), eaax7599–. doi:10.1126/sciadv.aax7599
- Dart, C. (2018) Fungi Are Responsible For Life On Land As We Know It. cbc.ca.. Disponible sur :https://www.cbc.ca/natureofthings/features/fungi-are-responsible-for-life-on-land-as-we-know-it (consulté le 10/11/2021)
- Université libre de Bruxelles. (2020) First mushrooms appeared earlier than previously thought. Phys.org. Disponible sur : https://phys.org/news/2020-01-mushrooms-earlier-previously-thought.htm (consulté le 10/11/2021)
- Martin, F. (2020) Symbiose et coopération entre les arbres et les champignons pour une forêt durable. Association française pour l’avancement des sciences. Disponible sur : https://www.afas.fr/symbiose-et-cooperation-entre-les-arbres-et-les-champignons-pour-une-foret-durable/ (consulté le 10/11/2021)